Malgré le 100 % santé, les lunettes restent anormalement chères
Les nouvelles dispositions de remboursement complet des frais d’optique devaient profiter à tous les assurés, depuis 2019. Mais les opticiens ne jouent pas tous le jeu, contrairement aux engagements pris par les organismes professionnels.
Le 100 % santé
La nouvelle réglementation dénommée « 100 % santé » prévoit la prise en charge totale du coût des lunettes, avec une gamme de produits très corrects. Ce programme s’applique aussi au marché des soins prothèses dentaires et auditives.
Plus de la moitié des opticiens ne jouent pas le jeu
Mais selon l’administration de la Répression des fraudes, plus de la moitié des opticiens n’affichent pas et n’annoncent pas l’offre dite « 100 % santé ». Certains même déconseillent ces modèles, alors que la réglementation leur impose au contraire des critères de qualité, choix et confort assez exigeants.
Exigez le respect de vos droits et sinon changez d’opticien !
Aussi, les consommateurs devraient réagir, en exigeant de tout opticien l’application de la réglementation, puisqu’il vend des produits grâce aux remboursements accordés par les assureurs. Le client peut réclamer un devis dans les trois gammes de produits : modèles de base, remboursement partiel mais important, ou prix libres, donc coûteux. Ces trois options doivent être proposées par tout professionnel, à tous les assurés.
A défaut, il faut changer d’opticien, et se tourner vers les réseaux de mutuelles, qui maîtrisent les prix et respectent leurs engagements.
Médicaments à éviter La liste noire 2022 de Prescrire
Leurs effets indésirables sont démesurés au vu de leur faible efficacité. La revue Prescrire plaide pour le retrait de plus de 100 médicaments qui exposent les patients à des risques trop élevés.
Qu’ils traitent des maladies graves ou non, encore trop de médicaments exposent les patients à des effets indésirables, parfois sérieux. Dans sa liste noire de 2022, la revue Prescrire liste 105 références qui ne devraient plus être prescrites, dont 89 sont vendues en France. La situation est inacceptable, quelle que soit la sévérité de la pathologie traitée, précisent les auteurs de cette liste : même en cas d’impasse thérapeutique, le bénéfice d’un médicament doit être clair.
UN NOUVEL INSCRIT
Un vieux médicament fait son retour dans la liste de Prescrire. Il s’agit de la fenfluramine (Fintepla), un amphétaminique qui n’était plus vendu depuis 1997. Depuis cette année, il est recommandé dans certains troubles épileptiques sévères et résistants aux autres médicaments. Il avait pourtant été retiré du marché en raison du risque d’hypertension artérielle pulmonaire et de valvulopathies – des effets indésirables également provoqués par le Mediator. C’est pour cette même raison que la revue préconise de ne pas l’utiliser.
TOUJOURS DÉCONSEILLÉS
Au rang des médicaments épinglés par la rédaction de Prescrire, on retrouve des médicaments couramment utilisés. Sans surprise, les décongestionnants oraux (Dolirhume, gamme Actifed, Humex Rhume, etc.) sont à éviter : ils sont peu utiles dans le rhume et comportent un risque cardiovasculaire réel. Les alertes se sont d’ailleurs multipliées à leur sujet et leur usage est officiellement déconseillé. Il en va de même pour les médicaments traitant le mal de gorge (Maxilase, Thiovalone, etc.) et la toux (Toplexil, Biocalyptol, etc.). Face aux maux de l’hiver, le recours occasionnel au paracétamol est à privilégier.
Dans le traitement de la douleur, plusieurs anti-inflammatoires ne devraient plus être prescrits. C’est le cas du diclofénac (Voltarène) ainsi que ceux finissant en « coxib », qui comportent bien plus d’effets indésirables que les autres molécules disponibles. Quant à la capsaïcine en patch (Qutenza), elle n’a pas démontré son intérêt et expose à des irritations cutanées, voire des brûlures.
En traitement du diabète, on manque encore de recul avec les nouvelles molécules, dont les effets indésirables ne sont pas négligeables. Les gliptines (Galvus, Januvia, Onglyza, etc.) provoquent, par exemple, des réactions graves d’hypersensibilité et favorisent les infections urinaires, les pancréatites ou encore les obstructions intestinales. La metformine doit rester la référence, tranche Prescrire.
DEUX SORTANTS
Les gliflozines (Forxiga, Jardiance, etc.), fait rare, sortent de la liste. Leur intérêt dans le diabète, l’insuffisance rénale et l’insuffisance cardiaque a été réévalué à la lumière d’études récentes. On observe une réduction de la mortalité en cas d’atteinte rénale, du risque d’insuffisance cardiaque en cas de néphropathie diabétique… Pour autant, Prescrire ne recommande pas cet ensemble de médicaments, responsable d’effets indésirables lourds : de graves infections urogénitales ou cutanées sont signalées.
Un autre médicament disparaît de la liste noire de Prescrire en 2022 : la cimétidine. Et pour cause, le traitement recommandé en cas de reflux gastrique n’est plus disponible depuis un rappel mondial. La cimétidine peut donc être utilisée, faute de mieux. Attention toutefois aux interactions médicamenteuses nombreuses.
Quechoisir.org – 8 décembre 2021 – Audrey Vaugrente
Hausse des prix : Pourquoi ça augmente en 2021
Avec l’allègement des contraintes sanitaires, le commerce reprend à un rythme soutenu. Mais la forte demande affole les marchés mondiaux, et les prix des matières premières flambent. Les conséquences sur notre porte-monnaie sont déjà perceptibles.
Le monde d’après ? Il ressemble à celui d’avant, en plus congestionné ! À peine les restrictions liées à la crise sanitaire allégées, la population s’est ruée sur les biens de consommation. La demande mondiale a bondi et, avec elle, le commerce international des produits, mais aussi des matériaux et de l’énergie, qui servent à les fabriquer ou à les transporter. Résultat : des embouteillages de porteconteneurs dans les ports, des retards de livraison et une hausse des prix que les aléas climatiques et les tensions diplomatiques se sont chargés de transformer en flambées. Les répercussions sont déjà visibles sur nos factures de gaz et de carburant. D’autres majorations mettront plus de temps à atteindre notre porte-monnaie, telles celles des denrées alimentaires, à moins qu’elles ne soient absorbées par les acteurs économiques au nom du pouvoir d’achat des ménages. En octobre, l’inflation était contenue à 2,6 % sur un an, dont seulement 0,6 % pour l’alimentaire mais déjà 20 % pour l’énergie (1).
La reprise très rapide désorganise le commerce
Qui dit redémarrage de l’économie, dit besoins en énergie (gaz, pétrole et électricité) et en matériaux de toutes sortes (bois, métaux, minerais, plastique, etc.). Seulement, « la reprise de la demande est plus vigoureuse qu’anticipée », explique Sébastien Jean, directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii). En ayant sous-estimé son ampleur, les fabricants courent après les fournitures, engendrant des augmentations de tarifs que le moindre incident décuple. Les sources d’énergie ont été les premières concernées, et gaz et pétrole se rapprochent dangereusement des niveaux atteints lors de la précédente crise mondiale, en 2007-2008. Les conséquences sont déjà perceptibles en France sur les factures de chauffage et le montant d’un plein ; le gazole a pris 22 % depuis janvier et les SP95/SP98, 20 % ! Les matériaux ne sont pas en reste, avec + 114 % pour le PVC, + 107 % pour l’acier ou encore + 26 % pour l’aluminium.
Face à ce rebond tous azimuts, les usines tournent à flux tendu. Et chaque rupture de stock en matériaux entraîne des retards de livraison, voire carrément des arrêts de chaînes de fabrication. En Europe, les constructeurs automobiles ferment certains sites de production durant plusieurs semaines faute de composants électroniques, tandis que les délais de remise des voitures aux clients s’allongent. Le secteur du bâtiment peine également à tenir la cadence, du fait des difficultés d’approvisionnement en matériaux de construction ou de la flambée de leurs prix. Une conjoncture parfois empirée par des décisions politiques. « Dans plusieurs pays, des mesures exceptionnelles ont été prises qui aggravent la pénurie de matières, précise Sébastien Jean. Ainsi, la Russie a interdit l’exportation de son bois brut vers la Chine, pour le transformer et l’utiliser sur place, et conserver la valeur ajoutée sur le marché intérieur. Cette dernière s’est donc adressée à d’autres fournisseurs, provoquant des tensions sur ce segment. » Le bois de construction a vu sa cotation quadrupler au printemps, avant que la bulle ne dégonfle.
Les effets de la crise sanitaire persistent
Y aura-t-il des jouets à Noël ? La question taraude les parents, au vu des reportages alarmistes sur les problèmes de livraison provenant de l’empire du Milieu. Les ports chinois fonctionnent au ralenti en raison de mesures d’hygiène très strictes destinées à contenir l’épidémie de coronavirus, alors même que le volume de marchandises qui y transitent a crû de 11 % en 2021, selon l’Organisation mondiale du commerce (OMC). L’activité du deuxième plus grand site portuaire du pays, à Ningbo, a été partiellement stoppée deux semaines en août, à la suite d’un cas de covid parmi les employés. À ces goulets d’étranglement s’ajoutent des perturbations du trafic routier et des pénuries de charbon (donc d’électricité) à cause de problèmes d’acheminement vers les centrales électriques. La Chine n’est pas un cas isolé. Dans les ports américains et européens, les retards s’accumulent, dont certains impossibles à résorber avant les fêtes de fin d’année malgré des cadences accélérées. En France, les enfants devraient néanmoins trouver leurs jouets au pied du sapin, le secteur ayant anticipé les commandes. Et leurs parents n’auront pas à débourser beaucoup plus que prévu, les catalogues ayant été imprimés avant que la situation se détériore.
Le dérèglement climatique perturbe plusieurs secteurs
Gel, pluies abondantes, inondations, cyclones, sécheresse et canicule : en 2021, divers endroits du globe ont subi un certain nombre d’aléas climatiques qui ont pesé sur le secteur agricole. Conséquence, les cours des céréales, des huiles et du soja se sont envolés de façon spectaculaire. Par exemple, le Canada, premier producteur et exportateur mondial de blé dur, a souffert du fameux dôme de chaleur ; ses récoltes ont chuté d’un tiers à cause de ce dernier.
D’autres activités ont été perturbées. Les ouragans qui ont frappé le golfe du Mexique ont provoqué l’évacuation de centaines de plateformes pétrolières cet été, tandis que le déficit de précipitations a handicapé la production industrielle un peu partout : les cours d’eau, à un niveau très bas, ont empêché les usines hydroélectriques de tourner, affecté le refroidissement des réacteurs nucléaires et entravé la fabrication dans plusieurs secteurs très consommateurs d’eau, tels que les semi-conducteurs, le textile, la chimie ou l’extraction minière. La transition énergétique et environnementale engendre par ailleurs des tensions, ponctuelles ou sur la durée. Ainsi, pour respecter les quotas annuels d’émissions de polluants imposés par Pékin, des régions entières ont mis leurs industries à l’arrêt pendant plusieurs semaines en septembre.
Les tensions géopolitiques font empirer la situation
Les diverses tensions géopolitiques n’arrangent rien. En raison de crispations diplomatiques, la Chine a par exemple suspendu ses contrats commerciaux de blé et de charbon avec l’Australie, son premier fournisseur. Elle achète désormais le premier en Europe et le second en Colombie, mais c’est plus loin, donc plus cher ! La Russie, quant à elle, utilise le gaz naturel comme moyen de pression vis-à-vis de l’Union européenne, très dépendante de ses livraisons – ce qui n’est pas de nature à calmer les prix. Autre mesure : Moscou a instauré une taxe à l’exportation dissuasive sur le blé russe. Cela lui permet de contenir sur son marché intérieur une hausse consécutive à une mauvaise récolte et d’éviter le mécontentement populaire. Or, en réduisant l’offre, cet acteur majeur du marché planétaire de céréales affole les cours mondiaux. Pour autant, faut-il redouter une spirale inflationniste ? Les distributeurs ont annoncé avec force communication qu’ils baisseraient leurs marges sur les carburants, à l’instar de Carrefour, Casino et E.Leclerc, ou sur une partie de leurs produits de grande consommation, comme Lidl. Jusqu’à quand vont-ils temporiser ? La Banque de France pronostique un apaisement des tensions courant 2022, en particulier pour le gaz. Mais le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, semblait plus pessimiste sur BFMTV, le 20 octobre dernier : « Je ne vois pas d’amélioration avant la fin de l’année 2022, au mieux… »
Transport maritime : Les conteneurs restent en rade
Des centaines de porte-conteneurs, chacun transportant plusieurs milliers de conteneurs, sont bloqués dans les ports en attendant d’être chargés ou déchargés. Les retards de livraison s’accumulent malgré des docks fonctionnant 24 heures sur 24. Les tarifs, eux, s’envolent : acheminer un conteneur de 40 pieds (le plus grand) en Europe depuis Shanghai (Chine) coûte jusqu’à 10 fois plus cher qu’avant. Au point que certains commanditaires annulent leurs achats, craignant de ne pas être livrés à temps pour Noël ou de ne pas rentrer dans leurs frais.
Fabricants et vendeurs, partout dans le monde, se sont émus des bénéfices colossaux encaissés par les majors du transport maritime. Ils les accusent de restreindre le nombre de navires en circulation pour faire grimper les prix. Le gouvernement américain a ordonné une enquête fédérale, et des acteurs du commerce en Europe réclament la même initiative de Bruxelles.
Inflation alimentation : le calme avant la tempête ?
Si la progression des prix des denrées alimentaires est restée modérée en 2021, tous les ingrédients sont présents pour que les tarifs montent l’année prochaine. Les premiers soubresauts ont touché les fruits et les légumes d’été, à cause d’une météo défavorable (gel, sécheresse…). L’abricot a vu son coût moyen grimper de 12 % entre janvier et août par rapport à 2020 ; la cerise, de 21 % et la pêche, de 9 %. « Les rendements de certains d’entre eux ont aussi pu être affectés par les épisodes de pluie », précise Interfel, l’interprofession de la filière. Depuis, les prix des denrées alimentaires se sont assagis dans les grandes surfaces. Cependant, ce n’est qu’un répit, car tous les voyants sont au rouge. Les aléas climatiques qu’a connus la planète cette année ont détérioré les niveaux de productions chez les principaux exportateurs (États-Unis, Canada, Russie, Ukraine). Ils engendrent la hausse des cours mondiaux, accentuée par la spéculation, l’accroissement de la population et la fonte des stocks de céréales censés compenser les mauvaises récoltes. Les augmentations se répercutent en Europe malgré des récoltes locales convenables. Le blé tendre y est passé de 160 € la tonne au printemps à un record de 280 € en octobre.
Le poids de l’énergie
En parallèle, la reprise économique, en faisant flamber les prix de l’énergie, du transport, des emballages, ou encore des engrais, alourdit les coûts de production au champ, mais également dans les élevages et les usines de transformation. « Toutes les matières premières agricoles sont en hausse : produits laitiers, céréales, huiles, confirme l’entreprise de plats traiteur frais Sodebo. Les matériaux que nous utilisons pour la fabrication de nos emballages sont également concernés. En exemple, l’indice du plastique a bondi de 55 % par rapport à 2020. » Si le coût des emballages préoccupe les industriels, les paysans, eux, scrutent celui de l’engrais azoté, incontournable en agriculture conventionnelle. En effet, son prix a été multiplié par 2,5 en quelques mois ; la faute au gaz naturel, son principal ingrédient, dont la moindre augmentation est répercutée immédiatement. Quant aux huiles et au sucre, ils sont directement impactés par le prix de l’or noir : qui dit pétrole cher, dit recours plus important aux agro carburants, dont ils sont constitutifs. « La principale raison de la hausse des matières premières agricoles, ce sont les mauvaises récoltes, mais si les cours s’envolent aussi haut, c’est dû au renchérissement de l’énergie », souligne Arthur Portier, du cabinet d’analyse Agritel.
Des répercussions très probables
Les prix au détail ont peu bougé jusqu’à présent, les différents acteurs du secteur agroalimentaire absorbant une partie des augmentations. Il n’y a néanmoins « aucun signe de détente d’ici à la fin de l’hiver, alors que le poulet coûte déjà 20 % de plus à élever », s’alarme François Cholat, président des fabricants d’aliments du bétail. « Les prix de nos produits ont été stables cette année. Toutefois, au regard des hausses des matières qui se poursuivront en 2022, nous allons reconsidérer notre position, avec un probable relèvement », prévient Sodebo. Les industriels ont déjà annoncé la couleur : ils comptent obtenir des tarifs majorés lors des prochaines négociations commerciales avec la distribution (lire l’encadré). Répercutée sur une baguette de pain à 1 €, la hausse du prix du blé entraînerait un surcoût de 0,02 € – sans compter les autres frais (transport, broyage, cuisson). Et de 0,10 € pour une boîte de six oeufs à 1 €. Concernant les pâtes, les fabricants ont déjà grappillé quelques centimes auprès des distributeurs. Le blé dur a pratiquement doublé (de 270 à 500 € la tonne) entre mai et septembre, le Canada, premier producteur et exportateur de la céréale, ayant vu ses récoltes drastiquement baisser à cause de températures estivales extrêmes. « La production mondiale a atteint à peine 33 millions de tonnes (Mt), alors que la consommation s’élève à 36 Mt, s’inquiète le syndicat de la filière. C’est la pire crise de notre histoire ! Nous puiserons dans les stocks, toutefois, ils sont limités. Il y aura une pénurie de pâtes au printemps. » Le consommateur doit aujourd’hui débourser 0,30 € de plus par kilo. Un montant certes dérisoire à lui seul, mais qui se cumulera aux probables augmentations à venir.
Depuis janvier, la cotation du blé dur français a flambé de + 74 %. Une telle augmentation se répercutera inévitablement sur le prix du paquet de pâtes en rayon dans les prochains mois.
Les prix des bouteilles des différentes huiles suivent la hausse des cours du colza (+ 59 % depuis janvier) et du tournesol (+ 23 %).
* Relevés de prix sur 4 265 drives de 9 enseignes (Auchan, Carrefour, Casino, Chronodrive, Colruyt, Cora, Intermarché, E.Leclerc et Système U), entre le 4 janvier et le 24 octobre 2021, sur 843 références pour les pâtes et 175 références pour les huiles.
Une nouvelle loi pour fluidifier les relations commerciales
La loi du 18 octobre 2021, dite « Egalim 2 » (1), devrait apporter davantage de poids aux industriels face à leurs acheteurs de la distribution, lors des négociations commerciales annuelles. Après huit années de déflation, le secteur agroalimentaire exige des hausses de tarifs pour compenser l’envolée des coûts de production. Gageons que les échanges avec les distributeurs seront plus tendus que jamais, au nom de notre pouvoir d’achat.
(1) Elle complète la loi Egalim de 2018 « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire », qui n’a pas réussi à pondérer les rapports de force entre industriels et distributeurs.
Inflation gaz et électricité : la concurrence balayée par la flambée des prix de gros
Entre le retrait de leurs offres commerciales et le coup de massue sur les prix facturés à leurs clients, la plupart des énergéticiens sont aux abois. Explications.
Si l’explosion du prix du gaz provient de la forte reprise économique qui intervient partout dans le monde en même temps, elle s’explique également par d’autres facteurs internes à l’Union européenne (UE). Au début de l’automne, ses stocks étaient au plus bas. Il fallait absolument les reconstituer avant que le froid hivernal ne s’installe, dopant ainsi la demande au plus mauvais moment. De plus, à l’exception de la France qui dispose de son parc nucléaire, l’électricité est produite de plus en plus souvent dans des centrales à gaz en Europe, le charbon étant délaissé, car très polluant. Enfin, la Norvège et la Russie, nos principales sources d’approvisionnement, ont toutes deux réduit leurs exportations. La première en raison de lourdes opérations de maintenance sur ses plateformes de forage en mer du Nord. La seconde, plus important fournisseur de l’UE en 2019, pour faire pression sur les pays membres afin qu’ils acceptent le très contesté gazoduc Nord Stream 2, et surtout dans le but de les pousser à signer des contrats de long terme. Attitude qui n’est guère en phase avec les grands discours actuels sur la neutralité carbone ! En attendant une éventuelle entente entre Bruxelles et Moscou, les consommateurs trinquent et subissent les hausses démentielles du tarif du gaz, qui culmine à des niveaux jamais atteints.
Tarif explosif !
Pire encore, alors que le parc de centrales nucléaires en service en France depuis les années 1970 fournit de l’électricité à un coût compétitif, son prix de gros en Europe ne dépend quasiment que de celui du gaz. Depuis l’ouverture du marché à la concurrence, c’est en effet le dernier moyen de production employé qui fixe le tarif. Or, il s’agit en général des centrales à gaz. Très souples d’utilisation, elles viennent en complément des autres modes de production lorsqu’ils ne suffisent pas à répondre à la demande. Si bien que le prix de gros de l’électricité a flambé en même temps que celui du gaz. « Le marché unique européen de l’électricité ne marche pas, il est aberrant », déclarait, fin septembre, Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie. On ne saurait mieux dire !
Les conséquences de cette dérive haussière des prix de gros ont été rapidement perceptibles. C’est la grande débandade sur les marchés du gaz et de l’électricité. Démarrée en septembre, elle continue à s’amplifier. Les uns après les autres, beaucoup de fournisseurs d’énergie ont supprimé leurs offres commerciales, ne proposant plus rien à la souscription. Car si l’ouverture à la concurrence avait fait émerger de nombreux acteurs, ils étaient issus du monde des affaires ou tout droit sortis d’écoles de commerce. Ils n’ont jamais produit le moindre kilowattheure (kWh) de gaz ou d’électricité, mais ont décidé d’en vendre en s’approvisionnant sur les marchés de gros. Les tarifs y sont depuis toujours très volatils, avec des hauts et des bas. Le business était néanmoins rentable en achetant aux moments propices. Avec la flambée actuelle, à des niveaux prohibitifs, ce modèle ne fonctionne plus du tout.
Contraints de se fournir sur ces marchés, ils subissent de plein fouet l’explosion des prix. Pour éviter la faillite, ils s’empressent de la répercuter sur leurs clients. À titre d’exemple, la marque Happ-e d’Engie, qui commercialisait des offres à – 10 % sur le prix du kWh hors taxes (HT) par rapport au tarif réglementé, est subitement devenue inabordable à la mi-octobre. Son kWh électrique est passé, du jour au lendemain, à 25 centimes toutes taxes comprises (TTC) en option de base, quand le tarif réglementé d’EDF s’élève à 16 centimes ! Idem avec l’heure pleine à 29,70 centimes contre 18,20 centimes, et l’heure creuse à 21,40 centimes au lieu de 13,60 centimes. Happ-e ne suit d’ailleurs qu’un mouvement quasi général. Les souscripteurs de l’opération « Énergie moins chère ensemble » organisée par l’UFC-Que Choisir en 2019 en savent quelque chose. Ils témoignent en masse des propositions tarifaires insensées que leur fait ekWateur, le lauréat, à l’issue de leur contrat : un abonnement plus cher qu’en tarif réglementé et un kWh beaucoup plus onéreux, que ce soit en gaz ou en électricité.
Une note très salée pour les usagers
D’ailleurs, assommer ses clients avec une hausse de prix spectaculaire est désormais une règle de survie pour de nombreux énergéticiens. Tel est, entre autres, le cas de GreenYellow, Mint Énergie, Planète Oui et Dyneff, qui ont pratiqué des augmentations phénoménales ; la liste est loin d’être exhaustive. Vattenfall, le leader suédois de l’électricité, s’est même retiré du marché du gaz. Quant à Eni, le mastodonte italien du secteur, il a presque jeté l’éponge. Après avoir usé et abusé de méthodes de vente peu orthodoxes et même illégales pour engranger un maximum d’abonnés, il se contente désormais de commercialiser son offre Webeo à un tarif tellement prohibitif qu’il faudrait être fou pour souscrire. En ces temps d’explosion des prix sur les marchés de gros, seuls les fournisseurs ayant signé des contrats d’approvisionnement de long terme ou, surtout, les gros producteurs d’énergie peuvent résister. C’est exactement ce qui se passe en France avec EDF, qui bénéficie du parc nucléaire du pays, ou TotalEnergies (nouveau nom du groupe Total), l’un des plus gros producteurs de gaz au monde, qui profite à plein de la hausse des prix. Pour Engie, premier opérateur gazier en Europe, c’est plus compliqué. S’il a de grosses capacités de transport et de stockage de gaz, il n’en produit pas.
Comment éviter ces augmentations spectaculaires ?
L’important est de se mettre à l’abri des hausses exponentielles qui feraient exploser les factures de chauffage, notamment cet hiver.
En électricité, c’est le tarif réglementé d’EDF qui vous protège le mieux, même s’il augmente de 4 % en février prochain.
En gaz, l’offre classique de TotalEnergies est la plus intéressante. Indexée sur le tarif réglementé, elle est à – 5 % sur le KWh hors taxes. Elle restera stable, car le tarif réglementé est bloqué à son niveau actuel tout au long de 2022. De plus, l’énergéticien étant un gros producteur de gaz, il ne risque pas de souffrir de la hausse des prix de gros. Souscrire une offre à coût fixe serait une erreur puisque les prix sont à leur plus haut niveau historique.
Bon à savoir. Les règles du marché de l’énergie étant spécifiques, la durée d’une offre à prix fixe n’engage que l’énergéticien. Le client peut le quitter à tout moment sans aucune pénalité, et le changement de prestataire est gratuit. Il est inutile d’informer son fournisseur : c’est le nouveau qui s’occupe des démarches. Cela dit, si le contrat actuel à prix fixe est inférieur au tarif réglementé d’EDF ou à l’offre gaz classique de TotalEnergies, il vaut mieux le conserver jusqu’à son échéance avant de le résilier.
(1) Selon les chiffres provisoires de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Quechoisir.org – 18 novembre 2021 – Elsa Casalegno et Élisabeth Chesnais
Echos de l’assemblée générale de Que Choisir tenue à HYERES les 9 et 10 octobre 2021
Cette assemblée générale a été marquée en tout début par le drame de la disparition brutale de Thierry DUQUEROY, directeur marketing de l’UFC-Que Choisir depuis 1998. Alain BAZOT a fait part le samedi matin, à l’ouverture de l’AG, de l’immense tristesse des salariés ainsi que de tous ceux qui avaient côtoyés Thierry DUQUEROY, rappelant son rôle éminent dans le développement tant du journal papier que du site numérique, et – au-delà de sa fonction – soulignant sa très grande vitalité, et son extrême prévenance aux autres.
Notre AL y était représentée par trois délégués : Yannick GRELLARD, Patrice CASSAGNE et Michel PICHON.
Les points saillants de cette assemblée générale
- Des rapports d’activité et financier 2020 qui témoignent de la bonne santé de la fédération
Année marquée pourtant par la pandémie COVID 19 et ses conséquences. Mais en dépit des bouleversements occasionnés, (réunions en visio, augmentation du nombre de litiges en ligne, mais ralentissement d’autres activités, tels que les rendez-vous conso ou les rencontres en présentiel), 2020 a été globalement une bonne année pour notre association :
- Un nombre d’adhérents en 2020 qui s’élève au total à 133.105 contre 138.116 en 2019, (-3,63 %). A noter pour le Maine et Loire une évolution contraire : 1.731 adhérents en 2020 contre 1.692 en 2019, (+ 2,30 %).
- En dépit des 5 mois de confinement et des contraintes de la crise sanitaire, notre association a continué avec efficacité à se faire entendre et à défendre la cause des consommateurs au niveau fédéral, alors même que le maintien des actions a été plus difficile au niveau des associations locales, avec le retrait obligé de nombre de bénévoles.
- A tous les niveaux, nous avons su nous adapter dans nos activités de défense du consommateur grâce à la généralisation de l’usage des outils de visio et de traitement des litiges en ligne.
- L’activité éditoriale de la Fédération a continué de se développer : en 2020 : la diffusion mensuelle de la revue Que Choisir a été en moyenne de 406.060 numéros, (+ 2,9 % par rapport à 2019), tandis que le nombre d’abonnés à Que Choisir.org, (212.635 en 2020), a augmenté de 21 % par rapport à 2019.
- Enfin, pour la 9ème fois consécutivement, l’année 2020 s’achève par un excédent, facilité par « l’effet ciseau » d’une diminution de nos dépenses courantes à cause des cinq mois de confinement avec en contrepoint une augmentation des recettes grâce à la forte augmentation des abonnements Web.
- La pertinence du projet associatif de Que Choisir a été renforcé par les conséquences de la crise sanitaire
Pour rappel, les trois axes fondateurs de ce projet sont :
- Une consommation sobre.
- Une consommation plus juste
- Une consommation responsable
Avec une prédominance de plus en plus marquée des préoccupations environnementales.
- Un point de vigilance cependant : la stagnation du nombre de nos adhérents accompagnée d’un vieillissement global
Ce constat est fait tant pour nos adhérents aux associations locales que pour les abonnés à la revue Que Choisir, qui se renouvellent peu et vieillissent.
En effet, aussi bien les administrateurs fédéraux que les représentants des AL ont parfaitement conscience du double risque :
- D’une concurrence – déjà existante – sur le créneau de la défense des consommateurs avec de nouvelles aspirations et exigences, (sur l’environnement par exemple), qui bousculent notre approche traditionnelle plus adaptée à un public « senior » qu’aux générations actives ou aux jeunes.
- De la généralisation d’outils de recherche, (Google), ou de communication, (réseaux sociaux, rendant obsolètes certains de nos outils de communication, le journal papier par exemple, certes toujours nécessaire mais intéressant surtout les plus de 65 ans
L’enjeu de ces prochaines années est donc d’intéresser de nouvelles catégories d’adhérents et d’abonnés, encore dans la vie active. A cet égard, l’abonnement WEB constitue un bon outil. Et la mise en place en 2021 d’une « adhésion sympathisant » se voulait être un vecteur d’élargissement et de rajeunissement de notre public. Il est encore trop tôt pour tirer un enseignement de cette nouvelle formule d’adhésion, (au 10 octobre il y avait 4.000 personnes adhérentes par ce biais).
Cela a constitué un thème de réflexion itératif de cette assemblée générale, ainsi que des échanges hors Assemblé Générale
- Deux approches extérieures à notre association, proposant de nouvelles stratégies
Comme souvent dans ce type d’instances, ce sont des réunions « périphériques » à l’Assemblée Générale qui ont apporté du contenu et de la réflexion sur le devenir de notre mouvement.
- L’atelier Mobilisation Citoyenne, (avec l’agence RUP)
La Fédération a missionné l’Agence « Relations d’Utilité Publique », (RUP, agence de communication coopérative qui travaille beaucoup avec le milieu associatif sur les bases suivantes :
« Depuis notre création il y a 15 ans, nous revendiquons de faire de la communication au service des associations, fondations, entreprises et acteurs publics sincèrement engagés en faveur de transformations sociales et environnementales. Nous affirmons qu’il est urgent de dépasser la société de consommation pour accéder à une société du bien vivre. Nous déplorons donc certaines communications soi-disant responsables qui ne veulent en fait rien changer en profondeur. Or l’époque a besoin d’engagements authentiques car le temps nous est compté. »
Cette agence travaille donc, (depuis quelques semaines), en lien avec une dizaine d’AL volontaires pour en premier lieu établir un diagnostic de nos modes de fonctionnement en matière de communication, pour proposer ensuite des axes d’évolution nous permettant à la fois d’intéresser un nouveau public plus jeune, plus dans la vie active, tout en faisant évoluer notre « modèle socio-économique » par une plus grande présence sur les réseaux sociaux et dans la vie publique grâce à un renouvèlement de nos thèmes et de nos méthodes d’action.
L’atelier animé par deux personnes de cette agence le samedi 9 octobre a « réveillé » les participants, même si pour certains une telle remise en question était difficile à comprendre et à accepter.
Il nous faut maintenant attendre les conclusions à tirer de ce travail piloté par la Fédération.
Pour les curieux, voici le lien conduisant au site de ce prestataire : https://lagencerup.fr
2. L’intervention de Philippe MOATI, co-fondateur de l’ObSoCo, Professeur d’économie à l’Université de PARIS-DIDEROT)
Ce professeur spécialisé sur les « nouveaux modèles de consommation » nous a fait un « cours magistral » passionnant resituant l’action de Que Choisir dans l’histoire économique récente et pointant également les thèmes sur lesquels notre association devra s’adapter et évoluer pour répondre aux nouveaux besoins des consommateurs liés à l’apparition et au développement de nouveaux modèles de consommation, (le e-commerce particulièrement).
L’ObSoCo, (Observatoire Société et Consommation), se définit ainsi :
« Une société d’études et de conseil en stratégie née en 2011 de la conviction que nous sommes en train de vivre une période de transformation profonde du modèle de développement des sociétés occidentales. Le modèle de consommation est en mutation et l’architecture des marchés de consommation en cours de redéfinition. L’ensemble des acteurs économiques et institutionnels doivent aujourd’hui repenser la façon dont ils se positionnent et créent de la valeur pour satisfaire le consommateur et le citoyen. Une tâche qui exige de remettre en cause ses visions du monde et de renouveler les concepts et grilles de lecture afin de donner sens aux mutations de la société et de la consommation pour mieux s’y adapter. »
Toujours pour les curieux, voici le lien conduisant au site de cette société : https://lobsoco.com
D’une certaine façon, aussi bien Philipe MOATI que les deux intervenants de l’agence RUP ont voulu nous prévenir que nous ne devions plus raisonner ni travailler selon « le monde d’avant » si nous voulions continuer à exister et influer. Et cela nous est possible pour peu que nous nous renouvelions tout en préservant les objectifs de nos associations, qui sont encore très solidement reconnus et respectés.