UFC-Que Choisir de Maine et Loire

Copropriété

L’usage privatif d’une partie commune (mis à jour)

La loi n°557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis stipule

-article 1 : La présente loi régit tout immeuble bâti … dont la propriété est répartie entre plusieurs personnes par lots. Le lot de copropriété comporte obligatoirement une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables.

-article 2 : Sont privatives les parties des bâtiments et des terrains réservées à l’usage exclusif d’un copropriétaire déterminé. Les parties privatives sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire.

-article 3 : Sont communes les parties des bâtiments et des terrains affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux… »

Les parties communes (PC) appartiennent à tous les copropriétaires, elles sont de 3 sortes

-PC générales destinées à l’usage de tous les copropriétaires (article 4),

-PC spéciales destinées à l’usage de certains copropriétaires (article 6-2),

-PC à jouissance privative destinées à l’usage exclusif d’un seul copropriétaire (article 6-3).

Les PC générales ont une utilité pour la collectivité, elles profitent à tout copropriétaire qui peut les utiliser ou y circuler librement. Par exemple : l’escalier d’accès aux étages, la pelouse, le décodeur des portes extérieures, les descentes d’eau de pluie… Elles génèrent des charges générales.

Les PC spéciales ne sont utiles qu’à certains copropriétaires : ils peuvent les utiliser librement. Par exemple : l’ascenseur, la barrière d’accès au parking, les rampes d’accès aux garages souterrains… Elles génèrent des charges spéciales.

Certaines PC sont utiles collectivement et profitent à tous, mais tout copropriétaire ne peut pas forcément les utiliser personnellement ou y circuler librement. Par exemple : la toiture-terrasse, les souches de cheminée, les murs porteurs… Elles peuvent cependant avoir un intérêt pour l’usage personnel, appelé jouissance exclusive, d’un copropriétaire ou d’un tiers. Cette PC convoitée est attenante ou très proche du logement du demandeur. Cela peut être un volume (comble, entrée, escalier, garage, hall…), une surface (balcon, couloir, cour, jardin, loggia, palier, parking, terrasse, toit…) ou un élément du bâti (façade, fenêtre, garde-corps, mur-pignon, souche de cheminée…).

Un droit d’usage privatif sur une telle PC peut donc être prévu par le règlement conventionnel de copropriété ou accordé par une décision spéciale de l’AG. Il peut générer des charges spécifiques.

1 – Droit prévu par le règlement de copropriété : il est attribué à un lot

Dans ce cas c’est un droit permanent qui se transmet avec ce lot, mais ce n’est pas pour autant un droit de propriété (cassation – 18 janvier 2018). Il s’exerce sur une partie commune désignée et son usage est réglementé. Il peut donner lieu au paiement de charges spécifiques, si cela est prévu dans le règlement conventionnel de copropriété.

2 – Droit accordé par lAG : il est attribué à une personne (copropriétaire ou tiers) à sa demande

Par exemple, est un usage privatif d’une PC : occuper une toiture-terrasse, agencer un jardin privatif, installer des bacs à fleurs, fixer une plaque professionnelle, poser un climatiseur à l’extérieur, installer une parabole, annexer un palier, peindre les murs de la loggia, fermer un balcon, changer (agrandir, transformer) une fenêtre (porte, porte-fenêtre, vasistas, fenêtre de toit), poser un store-banne (des volets, un pare-soleil, un brise-vent), fixer un panneau publicitaire ou une antenne-relais…

Si ce droit ne figure pas dans le règlement de copropriété, il peut être demandé à l’AG, qui est souveraine pour décider. Ce n’est pas le syndic qui dit ce qui peut être fait ou ce qui ne peut pas être fait. Il ne peut que rappeler les dispositions du règlement conventionnel de copropriété qui énumèrent ce qui est expressément interdit ou non-interdit, ce qui est autorisé ou non-autorisé ou constater qu’elles sont muettes.

Pour obtenir une telle autorisation, tout intéressé doit en demander l’inscription à l’ordre du jour de l’AG par LRAR envoyée au syndic. Au préalable il aura vérifié les dispositions du règlement de copropriété (prévu, interdit, silence), les possibilités techniques (accès, charge, vibration, alimentation électrique, maintenance…) et la faisabilité administrative dans le règlement du PLU qui s’applique à la zone où est situé l’immeuble.

L’autorisation de l’AG est accordée par une décision spéciale prise à la double majorité qualifiée de l’article 26. Si la majorité requise n’est pas atteinte, mais que les conditions de l’article 26-1 sont remplies, un second vote a lieu immédiatement à la majorité absolue de l’article 25. Le recours aux dispositions de l’article 26-1 n’est pas une possibilité offerte à tel ou tel, mais bien une obligation. Si ce second vote n’approuve pas la résolution, l’article 25-1 ne s’applique pas et un 3ème vote ne peut pas avoir lieu.

Si l’usage demandé est prohibé par le règlement de copropriété, il ne peut pas être accordé par l’AG.

Mais une modification préalable du règlement conventionnel de copropriété peut cependant être effectuée à la double majorité qualifiée de l’article 26. Si la majorité requise n’est pas atteinte, mais que les conditions de l’article 26-1 sont remplies, un second vote a lieu immédiatement à la majorité absolue de l’article 25. Le recours aux dispositions de l’article 26-1 n’est pas une possibilité offerte à tel ou tel, mais bien une obligation. Si ce second vote n’approuve pas la résolution, l’article 25-1 ne s’applique pas et un 3ème vote ne peut pas avoir lieu.

Ce nouveau droit ainsi défini, est attribué à un copropriétaire ou à un tiers et non pas à un lot. Il est temporaire, personnel et non transmissible. Il peut donner lieu au paiement de charges spécifiques, si cela est prévu dans le règlement conventionnel de copropriété ou la décision de l’AG l’ayant accordé.

Bien sûr, l’autorisation accordée doit être conforme à la destination de l’immeuble.

3 – Droit obtenu par usucapion : il est attribué à un lot

La prescription immobilière ne pouvant se faire qu’après le délai de 30 ans, le droit d’usage privatif d’une partie commune peut s’acquérir de façon perpétuelle par prescription acquisitive trentenaire (cassation – 24 octobre 2007) appelée usucapion (code civil – articles 2272). Pour revendiquer le bénéfice de l’usucapion, la possession doit avoir eu lieu de façon continue, non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire. Il n’est pas possible de joindre une possession (celle du père) à une autre (celle du fils) pour obtenir les 30 ans d’usage.

Mais le droit d’usage, même acquis par prescription, ne devient pas un droit de propriété pour autant, il est accessoire à la propriété du lot qui en profite. Sans dispositions spéciales dans le règlement conventionnel de copropriété, l’entretien de cette partie commune est à la charge du syndicat des copropriétaires.

La loi ÉLAN considère que les PC doivent le demeurer et a donné jusqu’au 23 novembre 2021 (3 ans après sa promulgation au JORF le 24 novembre 2018) pour que les syndicats de copropriétaires mettent à jour leur règlement conventionnel de copropriété en y faisant apparaître le droit de jouissance privative de PC de façon expresse (article 6-4).

Dans ce cas, il appartient aux copropriétaires concernés de demander au syndic soit la tenue d’une AG extraordinaire à leurs frais, soit au cours d’une AG ordinaire, la modification du règlement conventionnel de copropriété faisant apparaître cette possibilité d’usage privatif d’une PC.

4 – Dans tous les cas

L’exercice du droit d’usage privatif d’une partie commune par son titulaire doit être conforme aux dispositions du règlement conventionnel de copropriété et ou de l’autorisation accordée.

Le titulaire peut y effectuer de petits aménagements sans autorisation spéciale comme jardiner, disposer pots et bacs à fleurs, installer du mobilier de jardin ou faire un barbecue, si cela n’est pas expressément interdit par le règlement conventionnel de copropriété ou une décision spécifique de l’AG et n’occasionne pas de désordres au bâti et ne nuit pas aux voisins.

Des travaux plus importants sont envisageables, ils sont soumis à l’autorisation préalable de l’AG sous réserve d’en avoir préalablement vérifié la possibilité dans le règlement de copropriété (prévu, exclu, silence), la faisabilité technique (charge supportée par les structures, accessibilité, traficabilité, bruit émis, étanchéité, vibration engendrée, nature des matériaux choisis, ancrage, palette des couleurs, pollutions lumineuses, alimentation électrique…) et avoir obtenu l’autorisation administrative le plus souvent obligatoire (DP ou PC). Suivant la nature des travaux envisagés, l’AG devra voter soit à la majorité absolue de l’article 25 (autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci), soit à la double majorité de l’article 26 si les travaux modifiant les PC sont des actes de disposition autres que ceux visés à l’article 25.

Le règlement de copropriété ou l’autorisation donnée par l’AG peut mettre à la charge du titulaire des frais spécifiques d’entretien, les dépenses relatives au gros-œuvre du bâtiment restant à la charge de la copropriété.

Les litiges potentiels avec les voisins (copropriétaires ou non) ont trait à la non conformité de l’usage avec la destination de la copropriété ou les dispositions du règlement conventionnel de copropriété ou de l’autorisation accordée par l’AG ou de l’autorisation administrative délivrée. Le TJ déterminera les conditions d’exercice au cas par cas.

La remise en cause de ce droit est impossible sans l’accord du bénéficiaire.

5 – Avant dautoriser lusage individuel dune PC

ou des travaux affectant les PC ou l’aspect extérieur de l’immeuble et conformes à la destination de celui-ci, l’AG doit veiller à bien fixer et correctement libeller les conditions dans lesquelles s’exercera ce droit en précisant notamment ce qui est autorisé, ce qui est interdit, la durée, la nature des obligations réciproques, par exemple : les heures et jours d’utilisation, le poids, le délai pour lequel est accordée l’autorisation, les constructions, l’ancrage, le nuancier des couleurs, l’utilisation de certains matériaux, la semelle résiliente ou anti-vibratile, l’alimentation en électricité, les lumières émises, le seuil de bruit, l’alimentation en eau, l’arrosage, la protection, l’évacuation des eaux de pluie, le démontage en cas de travaux votés en AG, les indemnités dues au syndicat en contrepartie de l’usage et leurs modalités de versement, les indemnités dues au bénéficiaire en cas d’impossibilité d’usage, l’assurance des dégâts provoqués ou subis, la remise des lieux en état en fin de droit, l’intervention de l’architecte de la copropriété, l’imputation des frais induits ou des recettes…

texte à consulter (version au 6 novembre 2020) :

-loi n°557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

Novembre 2020